23 novembre, puis 24 novembre, puis 25 novembre, puis 3 décembre, les réunions de travail avec la société de capital investissement se sont intensifiées. Je n’arrive pas vraiment à savoir si mon investisseur est définitivement séduit par la cible de cette société à reprendre. Pour ma part, ce travail approfondi me renforce chaque jour davantage dans l’intérêt de ce formidable projet. Cependant, mon enthousiasme est parfois inversement proportionnel à celui du financier qui se défend de montrer le sien !
Au cours de ces réunions, j’ai rencontré le président de la société de capital investissement et c’est l’associé qui est en charge de l’étude de mon projet qui fait les présentations ; oh! surprise, il se déchaîne tout d’un coup et expose avec passion l’intérêt de la reprise à son président. Il s’est enfin un peu dévoilé, il a manifestement envie de faire ce deal. Je suis conforté dans la perspective du comité d’investissement du 13 décembre prochain.
En fonction de tous les éléments que je connais de l’entreprise, nous travaillons sur la valorisation qui sera proposée au cédant. La méthode du multiple de l’EBIT est retenue. En fonction de comparaisons faites avec des transactions récentes opérées dans le même secteur d’activité, nous retenons un multiple de 12. Ce multiple est donc appliqué sur le dernier EBIT de la société pour préparer l’offre d’achat. Avec les prévisionnels, nous projetons également la valorisation de sortie, à 7 ans. Nous comparons alors, avec le même multiple, les valorisations d’entrée et de sortie pour vérifier le TRI (taux de rendement interne) de l’opération financière. Un peu de tâtonnements pour ajuster la valorisation et le projet d’offre de reprise est précisé : il sera inférieur de 2 millions d’euros au prix de cession attendu par le cédant ! Il faut préparer le cédant à cette « déconvenue ». Je prends alors contact avec le futur ex-dirigeant afin de convenir d’un rendez-vous au cours duquel je testerai discrètement notre projet de valorisation.
Dès le lendemain, nous sommes le 26 novembre, nous déjeunons ensemble sur le port de La Ciotat. Je ne sais pas si j’ai été discret (apparemment, non) mais le cédant cerne parfaitement mon discours. Son prix de cession est ferme et définitif, à 2 millions d’euros de mon projet. Aucun de nous deux ne prend cependant l’initiative de clore les négociations, mais les relations sont désormais tendues.
Comme les mauvaises nouvelles n’arrivent jamais seules, paraît-il, l’investisseur va me présenter, au cours de l’une de nos réunions, les détails du projet capitalistique qui va nous lier ; je vais devoir me porter caution personnelle sur 50% du montant du prêt bancaire du LBO. Je ne vous livre pas le montant mais je vous assure que c’est énorme.
Heureusement, l’adage dit aussi qu’avec la mauvaise nouvelle, il y a toujours une bonne nouvelle. Effectivement, je découvre aussi tout l’intérêt de l’effet de levier du LBO : si je réussis les objectifs de développement que j’ai proposés dans mes prévisionnels, il est prévu un bonus financier à la sortie du LBO qui pourrait me faire bénéficier, selon des paliers de TRI atteints, d’une somme équivalente à 15 ou 20 fois mon investissement financier personnel : bingo, c’est ça l’effet de levier. Résumons : la caution personnelle pour acquérir une très belle société rentable face à une perspective de 20 fois mon investissement. Vous le feriez, vous ?
Avant le comité d’investissement du 13 décembre, mon investisseur et moi-même souhaitons rencontrer une dernière fois le cédant dans l’objectif de « détendre » les négociations concernant la valorisation ; ensemble, nous analyserons encore les informations financières de la cible dans le but de trouver des éléments qui pourraient nous permettre un retraitement du résultat d’exploitation de la société et ainsi revoir notre valorisation. Le rendez-vous est fixé le 7 décembre, à 11 heures.
Suite au prochain épisode… le 14 décembre.
Dans le prochain épisode, vous découvrirez les suites de la négociation avec le cédant, je vous livrerai la décision du comité d’investissement et ma décision face au projet "caution/20 fois". Vivement le closing.
Bruno,
Tu devrais regarder les mécanismes de garantie type Sofaris; les plafonds sont peut être insuffisants par rapport au montant de ta transaction mais en tout état de cause, évite la caution personnelle.
Bonne chance!
Rédigé par : chris | 08 décembre 2004 à 13:24
La vie d'un entrepreneur est naturellement plus risquée que celle d'un salarié. Etre caution sur ses biens en propre, pour des montants très importants sont une pression supplémentaire qui peut devenir difficile à supporter.
Je respecte ton enthousiasme pour cette aventure, mais je fais également confiance à ta lucidité sur ce type de décision.
Tu sais comme moi (nous en avons parlé lors de notre dernière rencontre) que l'on peut "planter" des sociétés en bonne santé pour des raisons complètement indépendante de notre volonté (et souvent totalement imprevisibles).
Ceci dit, soit fort, l'aventure reste passionante :-)
Rédigé par : Pierre-Olivier | 08 décembre 2004 à 19:41
Chris> OK pour Sofaris, c'est justement eux qui prennent les autres 50%.
Pierre-Olivier > mouaiiii, je ne suis pas sur de comprendre ton conseil ou plutôt ça m'ennuie !!!! mais je ne partage pas tout à fait ton point de vue.
Rédigé par : Bruno | 09 décembre 2004 à 07:33
Vu les montants en jeu, je ne pense pas que tu puisse passer outre ta caution personnelle...
Sur le fonds, j'ai l'impression que ton projet est plutôt bien ficelé. L'activité semble saine et prévisible. D'ailleurs, reprendre une société est bien moins risqué que de la créer (55% de réussite au bout de 5 ans).
A mon sens, il faut surtout que tu te concentres sur les points clés de la reprise :
- Struture du financement : quel pourcentage de ta capacité d'autofinancement réprésente le remboursement ? 70%, 80%, 90% ??? En d'autres termes, quelle est ta marge de maneuvre si tu n'atteints pas tes prévionnels ?
- Durée de l'accompagnement du cédant : il s'agit quand même d'un secteur d'activité que tu découvres et il te faut du temps).
- etc...
Reste que tout projet est risqué. C'est une dure loi de la vie : la rémunétation est proportionellee au risque.
C'est sûr que c'est le genre de risque qu'on ne prend qu'une fois dans sa vie.
Une dernière chose : j'espère, si tu es marié, que vous êtes sous séparation de biens.
Mon conseil : vas-y si tu crois à fonds.
Rédigé par : Nicolas | 09 décembre 2004 à 11:45
Viteeeeeeee...j ai hate de lire la suite de cette aventure qui a l'air plus que passionnante...il faudrait sans doute un livre entier pour expliquer finement l'ensemble des anecdotes de votre parcours...Bonne chance pour votre RDV de demain...tenez nous vite au courant...
Rédigé par : Bertrand Guyot | 12 décembre 2004 à 15:39
Nicolas > tu as l'air de connaître la reprise, que fais-tu ?
Bertrand > demain je n'assiste pas au comité d'investissement, c'est encore plus frustrant, je vais attendre !!!
Rédigé par : Bruno | 12 décembre 2004 à 16:22